Les Harfleurais et la brèche "La brèque"

(tiré du Livre de J.Lachastre)

 

"Henry V - Retournons, chers amis, retournons à la brèche, ou comblons la de nos cadavres anglais..."

W.Shakespeare

 

Les canons et les machines disposés sur le secteur ouest, projettent depuis le début du siège une quantité considérable de boulets de pierre contre les remparts et sur la ville. Henry V est bien décidé à ouvrir une large brèche où ses troupes pourront s'engouffrer. Il veut aussi démoraliser les assiégés en démolissant la plupart des habitations du quartier.

Le 17 septembre, la brèche est déjà importante, les murs se lézardent et des tours menacent de s'écrouler. Toutes les nuits, les Harfleurais réparent et consolident avec des pierres, des poutres, des fascines ou des tonneaux remplis de terre ou de sable. Au matin, les assiégés sont à nouveau à leur poste derrière une brèche en partie colmatée.

Des remparts jusqu'à l'église le quartier est en ruine, les maisons sont lézardées, les toits éventrés et les murs s'écroulent. Pour éviter les éclats meurtriers les Harfleurais ont répandu de la terre et du fumier dans les rues, les boulets qui tombent s'enfoncent et ne se brisent pas.

Henri V, excédé par cette résistance, menace les Harfleurais des pires représailles. Si la reddition n'intervient pas rapidement, l'assaut sera donné, la ville livrée au pillage et les habitants massacrés. Le temps presse en effet, la dysentrie fait des ravages dans le camp anglais et le roi de France peut tenter de venir débloquer sa ville. Les Harfleurais refusent à nouveau de se rendre.

                                              

L'assaut est donc décidé pour le 18 au matin. Henry V veut en finir avec cette "race à tête dure". Le pilonnage de l'artillerie doit être intensifié toute la nuit. il faut rendre la brèche intenable aux assiégés. Le bombardement nocturne doit aussi les priver de sommeil et les rendre plus vulnérables au matin. Sous cette avalanche de boulets les Harfleurais attendent avec angoisse l'assaut.

Les responsables de la défense se réunissent et malgré une mésentente probable entre Gaucourt et d'Estouteville, ils décident de renouer les négociations avec Henry V et de préparer la reddition. Ils obtiennent en effet que l'assaut soit retardé et que le bombardement cesse jusqu'au dimanche suivant.

Lorsque la capitulation a lieu c'est par cette brèche que les Anglais pénètrent dans Harfleur pour bien montrer qu'il s'agit d'une ville conquise.

 

Extrait de HENRY V de W.Shakespeare (1598)

Once more unto the breach, dear friends, once more; Or close the wall up with our English dead. In peace there's nothing so becomes a man As modest stillness and humility: But when the blast of war blows in our ears, Then imitate the action of the tiger; Stiffen the sinews, [conjure] up the blood, Disguise fair nature with hard-favour'd rage; Then lend the eye a terrible aspect; Let pry through the portage of the head Like the brass cannon; let the brow o'erwhelm it As fearfully as doth a galled rock O'erhang and jutty his confounded base, Swill'd with the wild and wasteful ocean. Now set the teeth and stretch the nostril wide, Hold hard the breath and bend up every spirit To his full height. On, on, you noblest English.

Whose blood is fet from fathers of war-proof! Fathers that, like so many Alexanders, Have in these parts from morn till even fought And sheathed their swords for lack of argument. Dishonour not your mothers; now attest That those whom you call'd fathers did beget you. Be copy now to men of grosser blood, And teach them how to war. And you, good yeoman, Whose limbs were made in England, show us here The mettle of your pasture; let us swear That you are worth your breeding; which I doubt not; For there is none of you so mean and base, That hath not noble lustre in your eyes. I see you stand like greyhounds in the slips, Straining upon the start. The game's afoot: Follow your spirit, and upon this charge Cry "God for Harry, England, and Saint George!"

(Riverside Shakespeare, 3.1.1-34)